Pour ce débat autour de la récupération et du recyclage des matériaux de batteries des voitures électriques, deux invités : Alain Geldron, expert national matières premières pour l’ADEME, et Jean-Denis Curt, responsable du pôle économie circulaire du Groupe Renault
Il est souvent reproché aux véhicules électriques de connaître des problèmes de recyclage des batteries. La filière existe bel et bien et se développe à mesure que le nombre d’unités en fin de vie augmente.
Recyclage des batteries plomb
La filière de recyclage des batteries n’est pas nouvelle. L’opération vise déjà à limiter la pollution des sols et des cours d’eau avec des produits qui provoqueraient parfois de graves problèmes aux organismes vivants, jusqu’à atteindre, au final, les êtres humains.
Ainsi pour les batteries plomb dont l’élément principal est particulièrement toxique, susceptible de déstabiliser lourdement les systèmes nerveux et digestifs. Le plomb est classé cancérigène, mutagène et reprotoxique. A cause d’une batterie de cette technologie abandonnée dans la nature, des particules de plomb peuvent empoisonner l’eau et les sols. L’électrolyte liquide, sous forme d’acide, est également très corrosif pour la peau ; les vapeurs de fin de charge sont irritantes pour les voies respiratoires.
Recyclage des batteries cadmium
Depuis une certaine directive européenne (2002/95/CE), la vente des batteries NiCd neuves est interdite auprès des particuliers. Raison : le cadmium est particulièrement dangereux pour l’environnement et toxique pour les êtres humains lorsqu’il parvient à sa forme gazeuse, cancérogène.
C’est le cas en fin de charge de ces batteries, caractérisée par l’émission de vapeurs qui, en plus de contenir de l’hydrogène, présentent des traces de cadmium dangereuses pour l’appareil respiratoire. Autre danger des batteries NiCd : la potasse, qui sert d’électrolyte, est très corrosive pour la peau.
Recyclage des batteries lithium
Aujourd’hui, ce sont davantage les batteries au lithium qui sont exploitées dans les voitures électriques. Sans recyclage, le risque serait, qu’à terme, des accumulateurs abandonnés de cette technologie soient emportés par des incendies, créant d’importantes fumées irritantes et toxiques, susceptibles de contenir du fluorure d’hydrogène.
Le lithium est un métal qui attaque les tissus organiques. Il réagit avec l’oxygène, l’azote et la vapeur d’eau contenus dans l’air pour former une substance, elle aussi, particulièrement corrosive.
Récupérer les composants
L’autre intérêt du recyclage des batteries de traction est de récupérer des éléments dont les prix peuvent avoir tendance à s’envoler, pas toujours disponibles dans de très importantes quantités, et qui peuvent à nouveau être exploités.
La fabrication de cellules lithium nécessite différentes matières et nombre de métaux, parmi lesquels, selon la technologie, on trouve du cuivre, du cobalt, de l’aluminium, du fer, du manganèse, de l’étain, du vanadium, du titane, du graphite, etc. Leur récupération permet de diminuer les coûts du recyclage des batteries, en tendant vers l’autofinancement des structures dédiées.
On commence par broyer
La plupart des méthodes de recyclage des accumulateurs commencent par un broyage.
Celui des batteries plomb permet de récupérer l’électrolyte, des granulés de polypropylène issus des coques, et des fractions du métal qui, après passage à 1.200° C dans un four, débarrassé des impuretés, ressort de la chaîne sous forme de lingots. Ces derniers serviront à produire de nouvelles batteries ou des projectiles pour la chasse.
Deux procédés coexistent pour le recyclage des accumulateurs lithium, qui débutent aussi par un broyage :
- Dans la technique de l’hydrométallurgie, les métaux ferreux vont être magnétiquement séparés des non ferreux. Les premiers vont être exploités en aciéries. Les autres vont subir un traitement chimique via une solution acide qui permettra de distinguer les différents éléments à destination du secteur de la métallurgie.
- Par la méthode de la pyrométallurgie, les déchets d’accumulateurs lithium sont introduits dans un four avec l’objectif de séparer les métaux par condensation. Trois produits en ressortent : les laitiers qui vont servir de remblais routier et à la fabrication de laines de roche ; les métaux ferreux que l’on retrouve en coutellerie de luxe, dans les disques de frein des TGV et dans les barres anti-stationnement ; les résidus non ferreux à affiner.
Filière encadrée
En 2001, l’Ademe a reçu pour mission de créer l’Observatoire des piles et accumulateurs qui devait recevoir chaque année des acteurs de la filière un rapport sur les volumes mis sur le marché, collectés, valorisés ou éliminés pour chaque technologie de batteries. Avec la transposition de la directive européenne 2006/66/CE, l’autorité dédiée devient Registre national des producteurs de piles et accumulateurs.
Dans son compte rendu publié fin 2016, cet organisme indique que « les premiers tonnages d’accumulateurs lithium issus des véhicules électriques avaient été traités en 2012 », précisant que les chiffres ont quadruplé en 3 ans. En France, pour l’année 2015, il a été collecté 11.903 tonnes d’accumulateurs industriels, – dont font partie les batteries de voitures -, plomb, 376 tonnes NiCd, et 170 tonnes lithium.
En partenariat avec les constructeurs
Les premières batteries de traction utilisées dans les voitures électriques ont été collectées en 2011. Ceci, conformément aux exigences européennes transposées en diverses directives dans l’Hexagone.
Il est strictement interdit d’incinérer ou d’abandonner en décharge des accumulateurs exploités dans les automobiles. C’est pourquoi une filière de collecte et recyclage a été mise en place en partenariat avec les constructeurs. Au début, du fait de la nouveauté de la technologie lithium, les faibles volumes récupérés avaient pour provenance des voitures électriques accidentées ou des packs défectueux. Désormais, les tonnages sont devenus significatifs.
Seconde vie des batteries des voitures électriques
Impossible aujourd’hui d’évoquer le recyclage des batteries lithium des véhicules électriques sans citer la seconde vie des accumulateurs, au cœur du système désormais. Il s’agit globalement d’allonger leur durée de vie, en partenariat avec les constructeurs automobiles concernés.
Quand ils ne sont plus exploitables dans les voitures électriques, parce que réduisant trop fortement l’autonomie, ils peuvent encore servir à des applications de stockage tampon. Ce scénario permet de baisser globalement la pollution générée par les batteries, depuis l’extraction des matières premières jusqu’au recyclage final. Ce point est développé davantage dans notre entrée sur « La durée de vie des batteries ».