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Depuis le 1ᵉʳ juillet, les établissements ayant un parking de plus de 1 500 mètres carrés, soit l’équivalent de 60 places, ont cinq ans pour s’équiper d’ombrières photovoltaïques. Objectif : produire de l’électricité décarbonée sans être contraint d’artificialiser les sols.
Depuis quelques mois, les parkings de l’Hexagone revêtent un nouveau visage. Publics ou privés, ils sont de plus en plus nombreux à s’équiper en ombrières photovoltaïques, certains n’ayant pas attendu la récente entrée en vigueur de la loi d’accélération sur les renouvelables, pour s’y conformer. Alors que les prix de l’énergie ont explosé depuis le début de la guerre en Ukraine, ces ombrières sont plébiscitées par de nombreux établissements, qui y voient un moyen d’obtenir de l’électricité à moindre coût.
A compter du 1er juillet,tous les sites dotés de parkings de plus de 1 500 mètres carrés, soit 65 000 établissements, disposent d’un délai de cinq ans pour pourvoir au moins la moitié de leurs parcs de stationnement en ombrières solaires. Cette échéance est même plus courte pour les parkings de plus de 10 000 mètres carrés, qui devront en être munis d’ici trois ans.
Avec ce dispositif, le gouvernement espère porter la capacité de production d’électricité solaire à 27 gigawatts dès 2028, contre 16 gigawatts aujourd’hui. Une mesure qui prend effet un an après le discours de Belfort, où Emmanuel Macron avait annoncé vouloir multiplier par dix la quantité d’énergie solaire en France d’ici à 2050. Autre atout vanté par le ministère de la transition énergétique, ces ombrières n’induisent ni artificialisation des sols, ni impact sur la biodiversité.
Les hypermarchés, centres commerciaux, aéroports et grands hôpitaux se retrouvent en première ligne de ce combat climatique. Deux options s’offrent à ces établissements : autoconsommer l’électricité solaire produite sur leurs parkings, ou la revendre à des opérateurs d’électricité publics ou privés.
« Vingt mille magasins de grande distribution, dont 800 centres commerciaux, sont concernés par ce dispositif », souligne Franck Charton, délégué général de Perifem, l’association technique des grandes surfaces, précisant qu’« un peu plus d’un millier sont déjà équipés à ce jour ». A l’instar du magasin Leclerc d’Avermes, ayant depuis 2021 le plus grand équipement en ombrières photovoltaïques de l’Hexagone. Etendu sur 22 000 mètres carrés, le dispositif lui permet d’assurer « entre 30 % et 40 % des besoins en électricité du magasin, liés à l’utilisation des réfrigérateurs, de la lumière… », assure le patron du magasin, Jean-Paul Oger. Selon les estimations de Perifem, une fois rentabilisées, d’ici une dizaine d’années, les ombrières devraient permettre de faire baisser la facture d’électricité des grandes surfaces de 30 % environ.
Plusieurs exceptions
Les ombrières gagnent aussi du terrain chez les acteurs publics, comme à l’hôpital d’Evreux, où ces équipements ont été installés en 2022 sur 4 200 mètres carrés de parking, et doivent maintenant être raccordées. Mais, à la différence des hypermarchés, cet hôpital, que la loi contraint désormais à équiper d’ici à 2026 au moins 50 % de son parking de 30 000 mètres carrés, n’avait pas les moyens d’investir dans ce dispositif. L’établissement a donc décidé, à l’issue d’un appel d’offres, de faire appel à un constructeur (Idex), qui bénéficiera d’une concession sur vingt-cinq ans pour installer et gérer ces ombrières, moyennant une redevance payée par l’hôpital. « Ces infrastructures doivent permettre d’alimenter une partie du centre hospitalier en électricité verte ainsi que dix bornes de recharge pour voitures électriques présentes sur le site », précise le responsable des services techniques de l’hôpital, qui souhaite conserver l’anonymat.
En Ile-de-France, où 7 500 parkings seront couverts à partir de 2026, l’installation de ces ombrières solaires devrait permettre de satisfaire 4 % des besoins en énergie de la région, selon une étude de l’Institut Paris région parue le 20 juillet. Plusieurs exceptions à cette mesure existent cependant : les parkings poids lourds ou de sites touristiques remarquables, ainsi que les parkings dont 50 % de la surface est ombragée par des arbres, en sont exemptés.
Si ces ombrières sont plus respectueuses de l’environnement que les fermes photovoltaïques installées à même le sol, qui impliquent d’artificialiser des espaces naturels, leur installation se heurte en revanche à des contraintes financières. C’est notamment le cas pour certaines structures de taille moyenne désireuses de conserver une pleine autonomie. « Beaucoup de patrons de supermarchés ne veulent pas devenir financièrement dépendants d’un tiers investisseur qui aurait installé des ombrières sur leurs parkings », étaie ainsi le délégué général de Perifem, ajoutant qu’« il se peut que certains magasins aient du mal à tenir les délais impartis par la loi, en raison d’une capacité de financement insuffisante ».
Pas question d’espérer gagner de l’argent
Pour la grande distribution, les investissements nécessaires ont été chiffrés à 12 milliards d’euros sur cinq ans par Perifem. Chez Système U, « le coût moyen par magasin est évalué à 400 000 euros », précise le porte-parole du groupe, Thierry Desouches, assurant qu’il n’est pour l’heure pas question d’espérer gagner de l’argent avec ce dispositif, mais de limiter le coût que devront supporter les magasins. Au ministère de la transition énergétique, on rappelle que tous les parkings pour lesquels ces installations ne seraient pas rentables seront exemptés par le biais d’un décret d’application, et que ces ombrières sont « nettement moins coûteuses que les installations de panneaux solaires en toiture ».
Si la plupart des établissements déjà équipés disent privilégier l’autoconsommation, certains d’entre eux peuvent aussi décider de revendre une partie de leur électricité à des opérateurs publics, à condition que leur production n’excède pas un certain seuil : « Tous les parkings dont le volume d’électricité généré par les ombrières est inférieur à 1 mégawatt-crête sont éligibles à un rachat de cette électricité par des opérateurs comme EDF, à un prix garanti par l’Etat », explique-t-on au cabinet d’Agnès Pannier-Runacher. Constatant le nombre croissant d’établissements susceptibles d’excéder ce seuil, Perifem plaide aujourd’hui auprès des pouvoirs publics en faveur d’un « rehaussement du seuil de rachat de l’électricité produite ».
Les établissements qui auraient recours à des constructeurs de panneaux solaires français pourront en outre bénéficier d’un délai supplémentaire pour l’installation, actuellement en discussion. Faute de quoi, cette mesure pourrait surtout profiter aux constructeurs chinois, qui dominent aujourd’hui très largement la production de panneaux solaires.